A la tête d’ACT212, un centre de consultation et de formation contre la traite des personnes et l’exploitation sexuelle à Berne1, Irène Hirzel parle de ces nouveaux « lover boys », parfois des adolescents, qui trouvent leurs proies souvent via les réseaux sociaux. « De jeunes Suissesses de 14 à 16 ans tombent amoureuses de jeunes hommes qui les livrent tout bonnement à la prostitution, explique-t-elle mercredi 16 mai. Appelons les choses par leur nom : il s’agit de jeunes proxénètes qui font de la traite d’enfants ! » Le grand amour tourne au cauchemar, où le sexe pour les jeunes filles s’opère avec des « amis » de leur amoureux, qui sont en fait des clients. Des films pornographiques sont également monnaie courante.
Téléphones de parents
Celle qui se bat contre l’exploitation sexuelle depuis des années indique avoir fait une recherche sur la problématique l’an dernier sans beaucoup de résultats. « Le sujet reste tabou en Suisse, contrairement à l’Allemagne ou la Hollande qui ont mis sur pied des polices spécialisées ». Mais depuis, Irène Hirzel a été alarmée par des mères qui ont composé sa ligne d’appel. Aujourd’hui, forte de témoignages de parents, elle lance une journée de discussion et d’information sur la thématique le 21 septembre prochain à Berne, à l’adresse des polices spécialisées et d’ONG actives dans le domaine2.
Femmes nigérianes sous la loupe
La mise en garde d’Irène Hirzel intervient dans la foulée d’une nouvelle de l’ATS qui soulignait mardi 15 mai que les femmes nigérianes étaient toujours plus nombreuses en Suisse à souffrir de prostitution forcée ou d’exploitation au travail. Ces femmes sont en effet souvent piégées par leurs trafiquants dans des rites de magie noire : avec la promesse d’une vie meilleure en Europe, elles subissent une cérémonie au cours de laquelle on prélève de leur corps des morceaux de peau, des cheveux, des bouts d’ongle. Puis elles se retrouvent dans l’une de nos villes forcées à se prostituer ou à travailler gratuitement pour rembourser à leur trafiquant les frais du voyage, dont le prix est fortement majoré. En cas de non-paiement, on les menace de rétorsion de la part des esprits auxquels on leur dit qu’elles sont liées. Mais selon Irène Hirzel, un dignitaire religieux au Nigéria a récemment placé une malédiction sur tous les trafiquants humains ainsi que sur les sorciers locaux qui imposent des serments de silence à leurs victimes. Un évènement qui pourrait libérer semble-t-il les Nigérianes engluées dans le trafic. Mais la bataille se déplace : de jeunes Chinoises font leur apparition sur nos trottoirs, souligne Irène Hirzel. Qui n’en continue pas moins son combat d’information et de prévention.
Gabrielle Desarzens