Le climat, Dieu, l’espérance et le contentement

Jean-René Moret, docteur en théologie et physicien, actuellement secrétaire général des GBEU vendredi 24 octobre 2025

Les problèmes climatiques croissants vont nous contraindre à vivre plus sobrement. Et cela se fera en accord avec le commandement divin de cultiver et garder la terre. En Jésus-Christ, cette contrainte peut être transformée en recherche d’un bien meilleur (1).

Au cœur du dérèglement climatique actuels se trouve un phénomène physique nommé « effet de serre ». La terre reçoit beaucoup d'énergie du soleil, essentiellement sous forme de lumière. Cette énergie réchauffe le sol qui réémet un rayonnement infrarouge. De la même manière que les vitres d’une serre laissent passer la lumière du soleil, mais réfléchissent les rayons infrarouges renvoyés par le sol, certains gaz de l’atmosphère « à effet de serre » laissent passer la lumière du soleil, mais réfléchissent le rayonnement infrarouge renvoyé par la terre. La chaleur est donc piégée à la surface de la terre. La vapeur d’eau, le gaz carbonique et le méthane font partir des gaz à effet de serre.

Depuis la Révolution industrielle, la force humaine et animale a été remplacée par celle des machines qui fonctionnent essentiellement au moyen d’énergies fossiles : gaz, pétrole et charbon. Mais, lorsque nous les brûlons, elles libèrent dans l’atmosphère du gaz carbonique et du méthane. Parmi les activités humaines qui produisent beaucoup de gaz à effet de serre, nous trouvons aussi l’élevage, la fabrication du ciment et la déforestation par brûlis.

L’augmentation de la concentration de gaz à effet de serre dans l'atmosphère produit un réchauffement, la fonte des glaces, la hausse du niveaux des mers, une augmentation de la puissance des cyclones, des vagues de chaleur plus intenses, des sécheresses et des inondations, un stress pour la vie sauvage, la mort de certains arbres, etc.

Ce réchauffement déclenche également des « mécanismes de rétroaction » qui amplifient le réchauffement de la planète.

► Lorsque l’air se réchauffe, il augmente sa capacité à contenir de la vapeur d’eau, amplifiant ainsi fortement l’effet de serre.

► Le réchauffement entraîne le dégel de grandes quantités de « pergélisol » – ou « permafrost », un sol jusque-là gelé en permanence. Des matières organiques sont libérées, fermentent et dégagent du méthane.

► La fonte des glaciers provoque une baisse de l'albédo, le pouvoir réfléchissant d'une surface. Les rochers gris renvoient moins la lumière que la glace blanche, contribuant ainsi à un réchauffement supplémentaire.

► Le réchauffement provoque une multiplication des feux de forêt qui, à leur tour, dégagent du gaz carbonique.

► Pour contrecarrer les effets du réchauffements, il est nécessaire de prendre des mesures qui exigent beaucoup d’énergie : construction de digues, climatisation, etc. Ces mesures accélèrent le réchauffement.

► Quelques mécanismes de rétroaction ralentissent le réchauffement global, mais ils ne sont pas suffisants pour l’arrêter.

Émettre moins de gaz à effet de serre

Que pouvons-nous faire, afin d’émettre moins de gaz à effet de serre ? Nous pouvons améliorer l’efficacité énergétique de nos machines ou l’isolation de nos bâtiments. Mais l’amélioration de l’efficacité énergétique conduit les humains à consommer plus. Par exemple, l’augmentation de l’efficacité des automobiles provoque une augmentation des kilomètres parcourus.

Une solution pourrait se trouver dans l’énergie nucléaire qui ne produit que très peu de gaz carbonique. Mais la gestion des déchets et le risque d’accident rend cette énergie impopulaire.

L'hydroélectricité semble être une source d’énergie idéale. L'énergie investie dans la construction d’un barrage peut, en moyenne, être récupérée cinquante fois sur la durée de vie du barrage. Mais les barrages noient des territoires, et le potentiel hydroélectrique de la Suisse est déjà largement exploité.

Le solaire et l’éolien sont deux sources d’énergies relativement propres, mais elles sont intermittentes : elles ne produisent de l’électricité que lorsque le vent souffle ou que le soleil brille. La construction de parcs solaires ou éoliens provoque des résistances et nécessite de l’énergie. L’énergie nécessaire à la construction d’un panneau solaire se monte, dans le cas le plus favorable, à un cinquième de l’énergie que ce panneau produira durant la durée de sa vie. Et n’oublions pas que la plupart des panneaux solaires ont été produits en Chine, du moyen de centrales électriques à charbon. La réalité, c’est qu’il n’existe pas d'énergie illimitée, sans conséquences néfastes pour notre environnement.

Actuellement, nous consommons essentiellement du charbon, du pétrole et du gaz, et cette consommation augmente. Nous utilisons aussi de l’électricité. Quant à notre production d’énergies renouvelables, éolienne, solaire, biocarburants, elle est anecdotique.

Baisser notre consommation

Nous n’allons donc pas remplacer les énergies fossiles par des énergies propres. Si nous voulons produire moins de gaz à effet de serre, une baisse de notre consommation est indispensable. Mais cela va à l’encontre de nos croyances, de l’idée que notre valeur et notre satisfaction se trouvent dans les biens, les expériences et la mobilité que nous achetons. Cependant, la Bible nous montre que les principaux problèmes de notre époque viennent du cœur humain.

La Bible nous que l'humanité a été créée à l'image de Dieu, et que Dieu a confié aux humains l’intendance du monde : « L’Eternel Dieu prit l’homme et l’établit dans le jardin d’Eden pour le cultiver et le garder » (Ge 2.15). Lors de la création, Dieu, la nature et les humains vivaient en harmonie. Les arbres donnaient leur fruits et les humains n’avaient qu’à se servir pour en manger.

Mais cet état a changé lors de la « Chute », ce moment où les humain ont choisi de devenir autonomes par rapport à Dieu. Cela a provoqué une rupture relationnelle, ainsi que la fin d’une harmonie qui concerne aussi la nature : « Le sol est maudit à cause de toi. C’est avec peine que tu en tireras ta nourriture tout au long de ta vie. [...] Tu en tireras ton pain à la sueur de ton front » (Ge 3.17.19). La nature ne donne plus ses fruits : il devient nécessaire de suer pour aller les chercher.

Plus tard, suite à la tragédie du Déluge, Dieu nous donne une espérance : « Jamais plus je ne maudirai la terre à cause de l’homme, puisque le cœur de l’homme est porté au mal dès son enfance. Et je ne détruirai plus tous les êtres vivants comme je viens de le faire. Aussi longtemps que durera la terre, semailles et moissons, froid et chaleur, été, hiver, et jour et nuit jamais ne cesseront » (Ge 8.21-22). Dieu s'engage à mettre une limite au dégâts que les humains commettent sur terre, mais cela ne nous autorise pas à nous comporter de manière irresponsable en attendant que Dieu « rattrape le coup ».

Apprendre le contentement

Des limitations physiques nous forceront à vivre avec moins. Et, pour y arriver, nous allons devoir remonter à la source de notre satisfaction : Jésus-Christ qui nous permet de vivre avec moins, sans souffrir de privations. L’apôtre Paul en témoigne : « J’ai appris en toutes circonstances à être content avec ce que j’ai. Je sais vivre dans le dénuement, je sais aussi vivre dans l’abondance. C’est le secret que j’ai appris : m’accommoder à toutes les situations et toutes les circonstances, que je sois rassasié ou que j’aie faim, que je connaisse l’abondance ou que je sois dans le besoin. Je peux tout, grâce à celui qui me fortifie » (Phil 4.11-12). Ce texte ne signifie pas que nous pouvons obtenir tout ce que nous convoitons, mais que Dieu nous donne la capacité d’être heureux en toutes circonstances.

Le mathématicien et philosophe Blaise Pascal constatait déjà que les humains courent sans arrêt à la recherche de quelque chose de satisfaisant : « Qu’est-ce donc que nous crie cette avidité et cette impuissance, sinon qu’il y a eu autrefois dans l’homme un véritable bonheur, dont il ne lui reste maintenant que la marque et la trace toute vide, et qu’il essaie inutilement de remplir de tout ce qui l’environne, recherchant des choses absentes le secours qu’il n’obtient pas des présentes, mais qui en sont toutes incapables, parce que ce gouffre infini ne peut être rempli que par un objet infini et immuable, c’est-à-dire que par Dieu même. » Au fond de nous se trouve un vide, causé par la Chute, que Dieu seul est capable de combler. Saint-Augustin écrivait : « Tu nous as faits pour toi Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose pas en toi ».

Mais il y a plus ! Paul écrivait : « Pour moi, en effet, la vie, c’est le Christ, et la mort est un gain. Mais si je continue à vivre dans ce monde, alors je pourrai encore porter du fruit par mon activité. [...] Je pourrai connaître le Christ, c’est-à-dire expérimenter la puissance de sa résurrection et avoir part à ses souffrances, en devenant semblable à lui » (Phil 1.21-22 ; 3.10-11). La satisfaction de Paul provient du fait que, pour lui, connaître Jésus-Christ est plus important que n’importe quelle circonstance. Il vise le Christ, et tout le reste devient secondaire.

Lorsque nous parlons de contentement en Jésus-Christ, nous ne parlons pas de nous satisfaire malgré ce qui nous manque. Nous parlons de trouver notre satisfaction dans une réalité qui dépasse les bien de ce monde. Vous avez peut-être l’impression de vous fatiguer à courir après des satisfactions : travailler pour se payer des vacances, partir en vacances pour se reposer du travail... Alors cherchez en Jésus-Christ le repos et l’apprentissage de la satisfaction.

La sobriété et le contentement sont des actes d’amour envers les autres et les générations futures. Il permettent d’entrer dans une espérance que Paul décrit ainsi : « La création attend, avec un ardent désir, la révélation des fils de Dieu. Car la création tout entière a été réduite à une condition bien dérisoire ; cela ne s’est pas produit de son gré, mais à cause de celui qui l’y a soumise. Il lui a toutefois donné une espérance : c’est que la création elle-même sera délivrée de l’esclavage, de la corruption pour accéder à la liberté que les enfants de Dieu connaîtront dans la gloire » (Ro 8.19-25).

L'espérance chrétienne ne consiste pas à être débarrassé de la matière, à s'échapper du monde matériel et à subsister comme âme spirituelle. La Bible nous parle plutôt d’un rétablissement à l’image du Christ ressuscité : après la résurrection, les disciples l’ont vu et reconnu, ils ont vu les marques des clous, ils ont mangé avec lui. Mais, en même temps, son corps n’était pas vulnérable et limité comme les nôtres. La nouvelle création sera transformée, mais dans une continuité avec la création actuelle.

Un cadre à notre action

Cette espérance donne un cadre à notre action, dans une création destinée à devenir « nouvelle création » :

► notre engagement en faveur de l’environnement est d’abord un acte d’obéissance envers Dieu ;

► nous sommes ouvriers avec Dieu dans la protection de la nature. En effet, Dieu a promis de mettre des limites aux dégâts qui font souffrir notre monde, et cela donne du sens à notre action ;

► les soins apportés aujourd’hui à la création sont une anticipation de ce que Dieu accomplira parfaitement à la fin des temps. Dieu utilisera nos efforts actuels pour les mener à la perfection.

Ce cadre nous conduit a être ni écrasés par la tâche, ni passifs, attendant que Dieu fasse ce qu’il faut. Ce qui nous est proposé, c’est de nous engager résolument, avec espérance, dans la protection de l’environnement. Voilà le défi qui nous est lancé !

 

(1) Ce texte est l’adaptation d’une conférence proposée en février 2024 par les Rencontres œcuméniques de Carême de la région Arve-lac (Genève). Jean-René Moret, le conférencier, est ancien pasteur à l’Église évangélique de Cologny (FREE), physicien diplômé de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et docteur en théologie.

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