Les lieux de culte chrétiens qui ont été fermés ne sont pas tant des églises que des entrepôts pour l’élevage de la volaille et des étables, a déclaré lundi soir 21 octobre Salaheddine Dahmoune, en marge d’une visite à Khenchela. Selon le site echoroukonline, il a ajouté que la cinquantaine d’églises protestantes en Algérie ne sont pas au bénéfice d’une autorisation délivrée par la Commission nationale des cultes pour les non-musulmans et qu’elles sont donc illégales. Cela signifie-t-il à terme la fermeture de toutes les églises protestantes du pays ? Les chrétiens concernés sont très inquiets. Mardi 15 octobre, l’Eglise du plein Evangile de Tizi Ouzou, en Kabylie, a été mise sous scellés. Cette église phare de l’Afrique du nord comptait plus de 1'200 membres adultes et rassemblait plus de 800 personnes à chaque célébration.
Des boucs-émissaires
Dans un communiqué de presse en date du 16 octobre, Salah Chalah, président de l’Eglise protestante d’Algérie (EPA) a signifié que la liberté de culte, pourtant garantie par la Constitution, était violée. Il a aussi mis en avant que ces actions visaient à semer le trouble parmi la population « plus unie que jamais ». Joint par téléphone mardi 22 octobre, il a précisé que selon lui, les autorités profitent du chaos ambiant qui règne toujours dans la rue – où les citoyens continuent de se mobiliser tous les vendredis – pour susciter un conflit entre chrétiens et musulmans. « Or plusieurs musulmans nous soutiennent. Tel a notamment été le cas pas plus tard que jeudi dernier où une tentative de sit-in devant la préfecture de Tizi Ouzou a mal tourné et où près d’une centaine de personnes ont été arrêtées et plusieurs tabassées. Parmi elles, il y avait des musulmans qui considèrent que nous sommes des boucs-émissaires. »
L’Eglise protestante, bientôt souterraine ?
Les églises protestantes algériennes ne parviennent pas à obtenir l’autorisation pour exercer leurs cultes auprès de la commission ad hoc. Les autorités voient en elles une menace alors qu’elles comptent de nombreux musulmans convertis au christianisme. Les quelque 3'000 personnes actuellement privées de lieux de rassemblement se retrouvent les unes chez les autres dans ce qu’on appelle des églises de maison. Mais cela aussi est interdit. Les protestants du pays se réuniront-ils de façon souterraine ? « C’est peut-être une période qui nous attend, souligne Salah Chalah. L’Eglise, ce ne sont pas des murs, mais l’ensemble des croyants. En ce sens, on ne peut pas l’étouffer. »
Gabrielle Desarzens