Tourisme : le Jura bernois propose une expérience humaine et spirituelle unique

jeudi 02 février 2012

Fort de son histoire religieuse mouvementée, le Jura bernois propose des parcours spirituels passionnants. Le Chemin des anabaptistes ainsi que le musée Digger à Tavannes ont de quoi alimenter la réflexion de plus d'un groupe d’ados, de jeunes ou de personnes plus âgées de nos Eglises. Et tout cela de manière interactive et ludique. Alors, préparez vos chaussures!

Bienne, Sonceboz-Sombeval, Tavannes, Tramelan, Corgémont, Saint-Imier... bienvenue dans le Jura bernois – et aussi au pays des anabaptistes! Autrefois exilés sur les crêtes du Jura, ceux-ci habitent désormais dans les villages des vallées. Mais leur histoire mouvementée a laissé des traces qui invitent à la réflexion. Un parcours pédagogique, nommé Chemin des anabaptistes, existe depuis quelques années. Conçu pour être parcouru à pied en un ou deux jours, il permet de traverser une nature magnifique, des lieux chargés d'histoire... et d’entrer dans une véritable expérience spirituelle.

 
Une région qui interpelle
« Cette région, c'est premièrement un paysage », explique Michel Ummel, ancien dans l'Eglise évangélique mennonite du Sonnenberg qui se réunit dans les chapelles de Tramelan, Jeanguisboden, Mont-Tramelan et Les Mottes. Il poursuit: « Nous connaissons tous les fonds de ces vallées, sans imaginer tout ce qui existe là-haut, sur les crêtes. Les anabaptistes y ont vécu, souffert, travaillé, prié... Désormais, ils vivent de plus en plus dans les villages des vallées. »
Même s'il est possible de rejoindre la plupart des lieux marquants de l'anabaptisme en voiture, Michel Ummel conseille de le faire à pied: « On monte à pied depuis la vallée. C'est un rythme... ainsi qu'une proximité avec la nature et des paysages exceptionnels. Le silence des lieux permet de s'affranchir des préoccupations d'en-bas, de prendre le temps et de s'ouvrir à autre chose. »
Au-dessus de Tramelan se trouve la chapelle du Jeanguisboden – Le Jean Guy pour les francophones. Michel Ummel y accueille régulièrement des groupes et leur sert de guide. Aujourd'hui, le lieu de culte abrite également un petit musée. On y trouve des documents remontant au XVIe siècle, notamment de vieilles bibles, des recueils de chants, des traités de théologie, des livres de contes de la Caisse des pauvres, des mandats édictés par les autorités bernoises à l'encontre des anabaptistes. On y comprend le fonctionnement du groupe, la mise à l'écart, la vie précaire durant les XVIIe et XVIIIe siècles, l'organisation de la solidarité.
 
Une triade de survie
Par le passé, la chapelle du Jean Guy a également abrité une école primaire. « Cela faisait partie de la triade de survie ferme-chapelle-école, explique Michel Ummel. En effet, exilés sur les crêtes du Jura, les anabaptistes ont organisé leur vie autour de trois pôles: la foi, en organisant des cultes; l'éducation par l'école qui permettait de lire la Bible; la survie économique grâce à l'agriculture. Et, bien souvent, le culte comme l'école avaient lieu à la ferme. »
En passant par Corgémont, on peut voir le buste et la maison du fameux Doyen Charles-Ferdinand Morel (1772-1848), un pasteur réformé très écouté et respecté, spécialement dans les domaines ecclésiastiques, politiques et sociaux. En 1809, celui-ci a écrit un rapport à propos des anabaptistes et de la non-violence. Il s'est ainsi fait le défenseur du point de vue des anabaptistes français qui résistaient à l'enrôlement dans les troupes napoléoniennes.
Au-dessus de Corgémont, en direction du Chasseral, se trouve le Pont des anabaptistes – en fait, les soubassements du pont qui s'est écroulé en 1924. Construit en bois au XVIIIe siècle, le pont reliait les montagnes de Corgémont et de Cortébert, par-dessus une combe. En 1835, à l’instigation du pasteur réformé de Corgémont, le pont a été reconstruit en pierre. Aujourd'hui, une passerelle toute neuve et des aménagements didactiques interactifs permettent de mieux comprendre cet endroit particulier, perdu dans une nature sauvage où des gens ont passé... mais aussi où ils se sont arrêtés pour prier en toute discrétion. On y trouve en particulier une oeuvre de Jean-Pierre Gerber, nommée Mémoire, formée de six cylindres qui représentent six siècles d'histoire anabaptiste.
La chapelle du Jean Guy et le Pont des anabaptistes sont deux sites à ne pas manquer. Michel Ummel y a déjà accueilli des groupes de visiteurs très différents. Il s'émerveille: « Souvent, les gens qui nous visitent s'engagent spontanément dans une discussion à propos de questions spirituelles. Ils sont frappés par le fait qu'ils ne visitent pas que des témoignages du passé, mais une communauté bien présente et actuelle. »
 
L'anabaptisme nous interroge
Il faut dire que l'anabaptisme pose des questions encore très actuelles à propos de la famille, de l'Eglise, des minorités, des politiques migratoires, de la cohabitation entre les religions, de la violence et de la non-violence. « L'histoire doit nous aider à ne pas reproduire les erreurs du passé », rappelle Michel Ummel.
De lieux historiques en métairies aux spécialités culinaires alléchantes, le Chemin des anabaptistes passe à proximité du Chasseral et à l'intérieur de son parc régional consacré à la nature et au développement durable. Il est ainsi possible de combiner ce parcours avec de nombreuses activités pour petits et grands. Mais il ne faudrait pas passer dans le Jura bernois sans aller visiter le musée Digger du déminage humanitaire, à l'arsenal de Tavannes. Il propose une information et une réflexion passionnante à propos d'une autre forme de violence particulièrement vicieuse: le commerce et l'utilisation des mines antipersonnelles.
Claude-Alain Baehler


Les anabaptistes
La Réforme du XVIe siècle a donné naissance à plusieurs courants protestants. Tous on remis en question la messe et l'eucharistie. Mais certains sont allés plus loin. Ils se sont attaqués au baptême des bébés et ont milité pour une séparation claire entre l'Eglise et l'Etat.
En 1525, la rupture est consommée entre les réformés zurichois et l'un de ces mouvements plus radicaux dont les adeptes sont nommés « anabaptistes » – ceux qui rebaptisent. Désormais, le mouvement se développe dans toute l'Europe, parallèlement aux Eglises nées de la Réforme. Mais les anabaptistes sont pourchassés et, parfois, exécutés.
Né en 1496 en Frise, dans les actuels Pays-Bas, Menno Simons devient curé à Witmarsum (NL). En 1536, il quitte ses fonctions au sein de l'Eglise catholique. Suite au drame de Munster – certains anabaptistes voulaient instaurer le Royaume de Dieu sur terre – il rassemble l'aile pacifique du mouvement. Rapidement, les anabaptistes sont surnommés « mennonites ».
A cause des persécutions, de nombreux mennonites se réfugient dans l'Emmental. Leur nombre augmente, la population locale les soutient... si bien que les autorités bernoises se mettent également à les persécuter. A la fin du XVIIe siècle, ils fuient à nouveau et plusieurs parmi eux trouvent un autre refuge sur les crêtes du Jura, dans l'ancien Evêché de Bâle.
Les anabaptistes du Jura sont agriculteurs, tisserands, charrons, cloutiers, relieurs... Ils organisent des cultes, souvent clandestins, assurent eux-mêmes l'école à leurs enfants et s'entraident grâce à une «Caisse des pauvres».
Au XXe siècle, l'évolution des mentalités permet aux anabaptistes de vivre enfin librement leur foi. Dans le Jura bernois, ceux-ci redescendent dans les vallées et s'établissent dans les villages. Leur histoire mouvementée leur a permis de développer une solide réflexion à propos de la non-violence et de la tolérance.

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