Parany Rasamimanana, hôte de la Campagne de Carême sur Espace 2 : « C’est de Lui que je tire ma force »

mercredi 20 mars 2013

L’accaparement des terres à des fins spéculatives et économiques met en danger des populations entières qui ne parviennent plus à vivre du produit de leurs activités agricoles. Hôte de la Campagne de Carême 2013, l’agronome malgache Parany Rasamimanana combat le mouvement. Son arme : l’épargne collective. Une lutte nourrie par ses convictions chrétiennes et les valeurs de solidarité et d’entraide qu’il défend.

La terre est aujourd’hui un objet de litiges, notamment à cause de son accaparement par des multinationales. C’est ce que dénonce cette année la Campagne de Carême des œuvres d’entraide catholique et protestante Action de Carême (AdC) et Pain pour le prochain, en collaboration avec « Etre partenaires », l’œuvre d’entraide de l’Eglise catholique chrétienne de Suisse.

Hôte de cette campagne 2013 intitulée « Sans terre pas de pain », l’agronome malgache Parany Rasamimana, 51 ans, est membre de l’Eglise de Jésus-Christ à Madagascar (FJKM) et collaborateur d’AdC sur la Grande Ile. Rencontré à Lausanne, il parle de la réalité agricole qui concerne le 80% de la population malgache et des programmes qu’il a mis en place pour lutter contre la spirale de l’endettement... et assurer l’autosuffisance alimentaire.
 
Dans le petit calendrier de la Campagne de Carême, le prêtre Bernard Miserez dit que « habiter la terre, c’est la recevoir comme un don, sans chercher à la posséder ». Etes-vous d’accord avec cela ?
Je suis d’accord avec la première patrie : c’est un don d’habiter la terre. Mais pour bien gérer ce don, il faut la posséder. Au début de l’existence de l’homme, il n’y avait peut-être pas de propriété foncière. Mais les Hébreux ont déjà dû se battre pour la terre promise, non ? (Il rit).
A Madagascar, des communautés agricoles vivent encore sans possession individuelle ; c’est le plus âgé du village qui gère la terre et qui la répartit, sans conflit. Mais dans plusieurs endroits, avec le nombre d’habitants qui augmente et la venue de gens de l’extérieur, la concurrence ainsi que l’inégalité ont gagné du terrain et la terre est devenue objet d’investissement, de spéculation. Il y aujourd’hui beaucoup de personnes sans terre.
 
Auriez-vous une image qui traduise le quotidien d’un paysan malgache ?
Celle que nous utilisons dans nos programmes de prévention présente un fût troué. Il traduit le fait que le paysan travaille de plus en plus dur pour remplir ce fût, une logique à laquelle participent plusieurs organismes d’entraide. Nous, nous proposons non pas d’aider le paysan à multiplier ses efforts qui l’épuisent, mais à boucher les trous. Ainsi peut-il par la suite remplir tranquillement le fût et nourrir sa famille. L’idée d’épargne commune, c’est ça : les paysans n’ont plus besoin d’emprunter auprès d’usuriers qui fixent des taux d’intérêt exorbitants qui les appauvrissent de plus en plus. L’épargne commune leur permet d’emprunter en cas de besoin, puis de rembourser par la suite, sans que personne d’extérieur ne s’en mêle.
 
Quelles sont les valeurs que vous tirez de votre foi chrétienne ?
La confiance, l’entraide et le sens du partage. Ces valeurs sont à la base de nos programmes. Cela fait longtemps que j’ai tout donné au Seigneur et c’est Sa force qui travaille en moi. Quand il y a des problèmes, je ne panique pas.
Cela dit, nos projets ne tiennent pas compte de la croyance des gens, et bénéficient tant aux chrétiens qu’aux animistes et aux musulmans : on œuvre au sein de 10'000 groupements. 500'000 personnes sont concernées. Nous voulons qu’elles aient en mains leur avenir.

Propos recueillis par Gabrielle Desarzens, diffusés jeudi 21 mars à 16h30 sur RTS Espace 2. Plus d’infos.
 
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