Dans le canton de Vaud, la nouvelle loi sur les relations Eglises-Etat vient de passer un premier examen. Au cours du mois de juin, les trois communautés religieuses, qui figurent nommément dans la Constitution de 2003, ont été invitées à réagir à l’ « avant avant-projet de loi lié aux articles ecclésiastiques ». Le synode de l’Eglise évangélique réformée du canton de Vaud, la Fédération ecclésiastique catholique romaine et la Communauté israélite de Lausanne ont débattu d’un document d’une septantaine de pages présentant un rappel historique des relations Etat-Eglises en Pays de Vaud, une explication générale et un commentaire article par article, ainsi que les lois elles-mêmes. Au nombre de 5, ces lois proposent un cadre général, puis une loi pour chacune des entités religieuses nommées, et enfin une loi pour les communautés religieuses reconnues d’intérêt public.
Ces lois n’ont actuellement qu’un statut de projet provisoire. Le Conseil d’Etat se prononcera sur son contenu à l’automne. Il aura la possibilité de l’accepter tel quel, de le remodeler superficiellement ou de le refaçonner de fond en comble. A ce moment-là seulement, un véritable avant-projet sera mis en consultation publique.
Les évangéliques directement concernés
Au début de 2004, des évangéliques vaudois ont déposé une demande de reconnaissance d’intérêt public auprès du Conseil d’Etat. Cette demande se fait de manière commune, mais les 5 familles membres de la Fédération évangélique vaudoise (FEV) ont déposé leur dossier séparément. Ces 5 familles sont l’Armée du salut, les Eglises évangéliques de la Fraternité chrétienne, les Eglises évangéliques de Réveil, les Eglises apostoliques évangéliques et l’Union des AESR (Assemblées et Eglises évangéliques en Suisse romande). Elles sont donc directement concernées par la cinquième loi qui touche aux communautés religieuses qui, à l’avenir, pourraient être reconnues d’intérêt public.
Si l’ « avant avant-projet » était adopté tel qu’il a été proposé aux trois communautés d’ores et déjà reconnues dans la Constitution de 2003, et si les Eglises évangéliques étaient reconnues d’intérêt public, les évangéliques pourraient bénéficier de différentes prérogatives intéressantes. Tout d’abord d’un accès aux établissements d’Etat. Les écoles, les hôpitaux et les prisons pourraient accueillir des aumôniers évangéliques. Ce qui se fait déjà dans certains hôpitaux en partenariat avec l’Eglise réformée. Mais ce droit serait étendu à d’autres sphères des activités de l’Etat. Grâce à cette reconnaissance, les évangéliques obtiendraient l’exonération fiscale sur les transferts immobiliers, les successions et les donations, ce dont en fait ils bénéficient déjà par d’autres voies juridiques. Les évangéliques pourraient aussi toucher une subvention cantonale pour l’accomplissement d’une mission au service de tous. Enfin, les Eglises évangéliques seraient consultées par l’Etat et les communes sur tout projet qui les concerne.
Certaines prérogatives apparaissent de moindre importance: le contrôle des habitants de chaque commune devrait informer les évangéliques de l’arrivée ou du départ de la commune de toute personne s’étant déclarée « évangélique ».
Des prérogatives liées à des conditions
Pour bénéficier de ces prérogatives liées à la reconnaissance d’intérêt public, les Eglises évangéliques vaudoises devront remplir certaines conditions. Certaines sont contraignantes et non négociables : toute communauté religieuse qui souhaite la reconnaissance devra respecter la liberté de conscience et de croyance de ses membres. Elle devra s’abstenir de dénigrer une autre religion et de mener tout prosélytisme contraire à l’ordre juridique. Elle devra aussi reconnaître le caractère contraignant de l’ordre juridique suisse et respecter les principes démocratiques. Cette communauté devra enfin tenir ses comptes en conformité avec le code des obligations.
D’autres conditions sont énumérées dans la loi, mais elles ne devront pas toutes être remplies par les communautés religieuses désireuses de bénéficier de la reconnaissance d’intérêt public. Ces communautés devront, par exemple, disposer d’une activité cultuelle sur l’ensemble du territoire cantonal, exercer un rôle social et culturel, ou encore « participer au dialogue oecuménique et/ou interreligieux »...